Les aciers inoxydables austénitiques, comme le 316L, sont largement utilisés dans l’industrie en raison de leur résistance vis-à-vis de la corrosion et de la fragilisation par l’hydrogène. Une fois absorbé dans le matériau, l’hydrogène diffuse dans la matrice métallique via les sites interstitiels et peut être piégé par des défauts microstructuraux tels que les joints de grains, les dislocations et les lacunes. Il apparait important de caractériser ces interactions et de déterminer les facteurs conférant le degré de sensibilité du matériau aux phénomènes de fragilisation par l’hydrogène. Ainsi, cette étude vise à évaluer les interactions existantes entre l’hydrogène et la microstructure développée lors de l’écrouissage du 316L.
De grandes éprouvettes de traction, prélevées dans une plaque d’acier 316L laminée, ont été hypertrempées puis écrouies à différents taux de déformation : 0 %, 1,5 %, 10 %, 20 % et
30 %. Des échantillons ont été extraits de leur zone utile, et leur microstructure a été caractérisée par microscopie optique et électronique (taille de grains, texture). La densité de dislocations a été quantifiée par analyses DRX. Les échantillons ont ensuite été chargés en deutérium (2H) par voie cathodique dans une solution NaO2H 0,1 M à température ambiante. Des vieillissements à 50 °C pendant différentes durées ont été effectués afin d’exacerber le signal provenant du 2H piégé [1], [2]. La distribution/redistribution du 2H en volume et entre les sites interstitiels et les défauts microstructuraux, potentiels pièges, ont été analysées en fonction du taux de déformation et de la durée de vieillissement par TDS, SIMS et avec l’appui de simulations numériques reposant sur un modèle de diffusion-piégeage de type McNabb & Foster [3].
Les thermogrammes expérimentaux ont permis de formuler plusieurs hypothèses sur le piégeage du 2H dans la matrice cfc soumise aux différentes pré-déformations. Chaque hypothèse a été testée en regard des résultats apportés par la simulation et l’ajustement des thermogrammes expérimentaux. Cette analyse a mis en évidence une interaction du 2H avec des pièges de forte énergie de liaison, compatible avec le cœur des dislocations et/ou les lacunes. Malgré la forte augmentation de la densité de dislocations (×50) au cours de la déformation, la modification des thermogrammes est relativement faible : l’effet de la pré-déformation sur la distribution du 2H dans les pièges associés au piégeage fort est limité. La part de 2H en interaction avec les pièges de faible énergie de liaison semble plus élevée dans les états pré-déformés qu’à l’état non déformé, mais elle est difficilement dissociable de la part du 2H interstitiel, compte tenu de la forte enthalpie de migration de l’hydrogène dans le 316L.
[1] C. Hurley, Université de Toulouse, 2015.
[2] A.-C. Bach, F. Martin, C. Duhamel, S. Perrin, F. Jomard, and J. Crepin, Journal of Nuclear Materials, vol. 562, p. 153603, Apr. 2022.
[3] A. McNabb and P. K. Foster, Transactions of the metallurgical society of AIME, vol. 227, pp. 618–627, 1963.